Ce magasin 100% bio, vrac et indépendant, au 120 rue des Pyrénées, prône une consommation responsable par la bonne humeur et par ses engagements associatifs
Un bâtiment bas en briques occupe l’angle de la rue des Pyrénées et la rue Vitruve – juste avant que cette dernière ne passe sous la Petite Ceinture. Ici, à l’ombre d’un immeuble moderne, Toutbon brille quand même grâce à sa devanture jaune soleil et son logo joyeux de chérubin volant sur une abeille. Ce magasin indépendant bio rayonne aussi dans le quartier avec ses initiatives de redistribution alimentaire et de compostage.
« Il était important pour nous de trouver notre place ici, d’être un vrai commerce de proximité, d’avoir un rapport humain dans une ville où il y en a de moins en moins. A côté vous allez être accueilli par un vigile et une caisse automatique. Pour nous ce n’est pas ça le commerce », explique Romain Grospiron, qui a fondé Toutbon avec Aude Bardaine. En 2019, ces deux cousins, désenchantés par leurs emplois dans des grands groupes, cherchaient à « revenir à des choses simples avec un impact direct ». Convaincus par l’agriculture biologique et le zéro déchet, ils décident d’ouvrir un magasin non seulement bio et vrac, mais aussi indépendant des grandes chaînes et engagé dans son quartier. Toutbon, certifié Ecocert, ouvre en septembre 2019, à la place d’une ancienne supérette, au 120 rue des Pyrénées, un grand espace de 200m2 sur deux étages.




« C’était naturel de s’installer dans ce quartier parce qu’avec Aude, on le connaissait, et on savait que les gens comprendraient notre proposition », dit Romain, qui a habité la rue Alexandre Dumas pendant six ans et trouve qu’« il y a une conscience politique plus forte dans les quartiers populaires. Les gens réfléchissent un peu plus aux conséquences de leurs actes et sortent de la tendance pour aller chercher des alternatives. »
Toutefois, Aude et Romain ont compris que les clients seront attentifs à leur temps et à leur argent. « Nous avons vraiment construit ce magasin sur cette promesse des courses du quotidien, sur les vrais produits de base, sur lequel on cherche le meilleur rapport-qualité prix », explique Romain « Nous faisons très attention à tenir les prix sur les produits de consommation courante : les carottes, les poireaux, les pommes de terre, en ce moment ». Les meilleures ventes sont les pommes, les bananes, la lessive, le papier toilette et le lait.
Reconnaissant que le bio est plus cher que le conventionnel, Romain souligne qu’acheter des produits en vrac et non transformés, et les cuisiner à la maison permettent aux clients de maîtriser leur budget. Toutbon vise à proposer des produits en vrac 15% moins chers que l’équivalent bio emballé et continue à étendre son offre de vrac. « Aujourd’hui, nous avons le plus grand rayon vrac 100% bio de Paris, avec plus de 600 références alimentaires [thé, café, épices, céréales, légumineuses, confiture, miel] et non alimentaires [produits ménagers et cosmétiques]. Le vrac représente presque 25% du chiffre d’affaires de notre magasin », précise Romain.


Maintenir les prix a été un gros sujet cette année, alors que l’inflation a poussé les fournisseurs à augmenter leurs prix, et l’augmentation du prix de l’énergie a quadruplé la facture d’électricité du magasin. « Nous avons considéré que ce n’était pas raisonnable d’augmenter nos prix/marges au moment où les gens sont en tension sur le pouvoir d’achat. Donc on a trouvé un autre système : on a fait un gros travail pour diminuer toutes nos charges, notamment en révisant tout l’installation électrique. » Cette tendance morose s’ajoute à un marché bio « plutôt fragile », mais « les clients sont là et fidèles au rendez-vous. On voit que les gens réduisent un peu leur consommation, que le panier moyen est un panier moins important, mais la fréquentation du magasin reste aussi importante ».
Cette année, Toutbon s’est aussi appliqué pour augmenter son offre de petits producteurs artisanaux et locaux (fromage, yaourt, pâtes fraîches, poisson), proposer plus de produits consignés (lait, lait végétal, bière, jus de fruits, de l’eau) et utiliser des emballages compostables pour tous les produits reconditionnés par le magasin (fromage à la coupe, quiche, antipasti). Aujourd’hui, 50 à 60% des références sont zéro-déchet (vendues en vrac ou en emballages compostables ou consignés), ce qui représente une économie de 3 tonnes d’emballage par an.


Les engagements sociaux et écologiques du magasin se poursuivent hors de ses murs : « On ne jette rien. Nos poubelles sont vides », affirme Romain. Les invendus sont distribués via les applications anti-gaspillage Hop Hop Food et Phénix, ou ils sont donnés à La Cantine Solidaire de La Flèche d’Or ou à Moissons Solidaires. Le reste part chez Les Alchimistes pour être composté avec les déchets verts récupérés dans le bac à collecte en libre service devant le magasin. L’initiative a été lancée avec Veni Verdi, mais « ça a tellement bien marché que c’était trop pour eux – 15 tonnes par an ! » explique Romain, qui assure que l’association et d’autres jardins du quartier viennent toujours chercher les déchets verts qu’il leur faut. Toutbon vend aussi des produits de Veni Verdi (plantes, herbes aromatiques) ainsi que le compost des Alchimistes. « Il y une richesse du terroir associatif dans le 20e qui fait un cercle vertueux. Toutbon est un des maillons d’une chaîne complexe. »
Heureux de leur reconversion professionnelle, Aude et Romain sont également contents d’avoir créé des emplois pour 14 personnes. « Nous sommes très attentifs à la façon dont nous recrutons et manageons notre équipe. Et à la façon dont nous accueillons et conseillons nos clients », dit Romain. « Tout le monde ne passe pas la porte de ce magasin pour acheter bio ou en vrac, ou pour changer ses habitudes. On essaie d’être accompagnateur, de faire de la transition joyeuse par la bonne humeur. Et on voit que les gens adoptent ces usages, que cette légèreté marche plutôt bien. »



Toutbon
120 rue des Pyrénées
Métro Maraîchers ou Tram Marie de Miribel
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